L'aider à mourir
La mort de Vincent "est programmée maintenant. C'est moi qui vais l'aider à mourir". Marie Humbert a annoncé mardi 23 septembre 2003, dans Le Parisien, l'euthanasie prochaine de son plus jeune fils. Un acte mûrement réfléchi et préparé "depuis des mois", indique-t-elle. "Je vais l'aider parce que personne n'a le courage de le faire et parce que c'est sa demande", insiste-t-elle.
Ce mercredi 24 septembre 2003, la mère de Vincent Humbert, 22 ans, devenu tétraplégique, aveugle et muet à la suite d'un accident de voiture, a été interpellée, après lui avoir administré, à sa demande, une dose de substance barbiturique.
La garde à vue de Marie Humbert a été levée jeudi 25 septembre dans l'après-midi.
"Ce livre, je ne le lirai jamais de mon vivant (...) car je suis mort depuis le 24 septembre 2000 peu après 20 h sur une route départementale de l'Eure", écrit Vincent Humbert dans les premières pages de son livre-testament.
Intitulé Je vous demande de mourir, ce recueil, qui paraît jeudi 26 septembre 2003, témoigne de la souffrance du jeune tétraplégique qui ne veut plus de "cette vie".
C'est le journaliste Frédéric Veille qui a recueilli les propos de Vincent et élaboré le texte. "J'ai longtemps hésité (...) puis j'ai relevé le défi. Pour lui, pour moi. Car ce gosse m'a ému", explique-t-il dans la préface.
Lors de son accident Vincent a perdu, entre autres, la faculté de parler et pour communiquer avec reporter, il enfonçait son pouce dans la paume du journaliste qui lui dictait l'alphabet.
Le 30 novembre 2002, depuis son lit de l'hôpital de Berck-sur-Mer, Vincent avait demandé au président de la République le droit de mourir, en vain. La loi française n'autorise pas l'euthanasie. Par son livre, Vincent souhaite relancer le débat.
Une pratique autorisée aux Pays-Bas et en Belgique
La majorité des pays européens considère la pratique de l'euthanasie comme un crime.
En France, elle est strictement interdite et assimilée à un meurtre, un assassinat (euthanasie active) ou une non-assistance à personne en danger (euthanasie passive).
En Grande-Bretagne, la forme active et l'aide au suicide sont assimilées à un meurtre. En Allemagne, le sujet est tabou.
Les Pays-Bas sont les premiers au monde, depuis avril 2001, à avoir adopté une législation libéralisant l'euthanasie. Les médecins néerlandais peuvent interrompre la vie d'un patient à la demande de celui-ci ou l'aider à se suicider, à condition de respecter des critères fixés par la loi et de signaler la mort à une commission de contrôle.
En Belgique, la loi énumère une série de conditions : le patient doit se trouver "dans une situation médicale sans issue" et doit faire état "d'une souffrance physique ou psychique constante ou insupportable" résultant d'une "affection accidentelle ou pathologique, grave et incurable".
En Suisse, le patient bénéficie du droit à l'autodétermination pour accepter ou refuser un traitement, même si, ce faisant, il hâte sa mort. Dans les faits, seule une association, Exit ADMD, très active dans le débat sur l'assistance au décès, apporte une aide au suicide. Elle s'appuie sur l'article 115 du Code pénal helvétique, qui autorise l'"assistance, médicale ou non médicale, au suicide en l'absence de mobile égoïste".